Plusieurs grandes villes européennes concernées par la surabondance de locations touristiques de courte durée voudraient avoir des moyens d’action.
Beaucoup de villes européennes sont confrontées aux mêmes problèmes posés par la location touristique de courte durée que Paris. A grande échelle, elle peut entraîner une hausse des loyers, une éviction des résidents, une mutation de quartiers entiers en zone touristique et constitue une concurrence déloyale envers l’hôtellerie, sans oublier la délinquance fiscale, le non-paiement des taxes de séjour ou de l’impôt sur les revenus ainsi générés.
« Nous subissons la colère des citoyens qui ne peuvent plus se loger et aimerions bien disposer des mêmes moyens légaux que Paris. Les locations débordent désormais du centre historique et des îles, s’étendant à la ville de Mestre, et dès qu’un Vénitien meurt, son appartement est immédiatement loué sur Airbnb… soupire Simone Venturini, adjoint au maire de Venise chargé du développement économique. Mais nous n’avons pas de loi nationale et nous ne pouvons pas restreindre le nombre de nuitées ou appliquer des sanctions. »
Nombre de nuitées limité
La ville de Venise a seulement instauré une taxe de séjour de 5 euros à 6 euros la nuitée, qui rapporte environ 30 millions d’euros par an, ainsi qu’une procédure d’enregistrement, avec un système de signalement par mail où voisins et riverains peuvent, anonymement, indiquer à la mairie les appartements « hors la loi ». « Nous recevons entre 100 et 200 signalements par an », ajoute M. Venturini. Venise n’est pas la seule ville en Italie à se plaindre : Florence, Bologne, Rome ou encore Naples sont confrontées aux mêmes problèmes.
Lorsque la ville de Vienne a vu déferler, à partir de 2016, les locations touristiques touchant jusqu’aux logements sociaux – dont la capitale autrichienne est championne d’Europe, puisqu’ils représentent 60 % de son parc –, elle a immédiatement obligé les sites Internet à communiquer leurs données sur les loueurs afin de les identifier et de taxer leurs revenus. Aujourd’hui, onze plates-formes, offrant 1 600 appartements, se soumettent à ces lois nationale et locale et, après accord, collectent les taxes. Seule Airbnb a refusé de le faire pour ses 900 annonces. « Nous voulons établir des lois claires et loyales. Aucune plate-forme digitale ne peut se placer au-dessus des lois et nous devons trouver des solutions à l’échelon européen face à des acteurs comme Airbnb, avec qui nous avons négocié pendant un an et demi, en vain », raconte Peter Hanke, conseiller municipal de Vienne.
A Munich, 18 000 appartements (sur un total de 1,8 million) sont loués aux touristes, mais aussi aux travailleurs venus de l’Est. La ville limite à soixante le nombre de nuitées, avec des sanctions possibles jusqu’à 55 000 euros pour les contrevenants, mais rencontre les mêmes difficultés de contrôle que ses homologues européennes.
Et si Paris a mis en place une brigade de vingt-cinq contrôleurs, ses procédures sont suspendues tant que le recours d’Airbnb, qui conteste la loi française devant la Cour de justice européenne, n’est pas tranché.
« Avec l’installation de la nouvelle Commission européenne et du Parlement, le moment est propice pour porter nos revendications et revoir les directives européennes sur la libre prestation de services et l’e-commerce, élaborées bien avant l’émergence de ces plates-formes et devenues obsolètes », rappelle André Sobczak, vice-président de Nantes Métropole et de Eurocities, une association qui fédère 150 villes d’Europe.