« Vous représentez les syndicats à Bruxelles. Peut-on en déduire que l’Europe vous tient à cœur?
Bien sûr, l’Europe me tient à cœur. Mais je ne suis pas pro-européenne sans nuances. Je travaille pour une organisation syndicale qui cherche à modifier le cours de l’Europe, à la rendre plus sociale. Pour cela je dois mettre ensemble des gens de cultures différentes, et ma seule perspective ne suffit pas. Essayer de faire progresser les choses, à partir de points de vues et de bagages culturels très différents me plaît; c’est aussi ça que j’aime dans l’Europe.
Vous dites que l’Union européenne n’est pas assez sociale, pourquoi ?
Il y a beaucoup de gens qui voudraient faire de l’Union européenne un libre marché, dans lequel tous seraient en concurrence sur tout, y compris sur les conditions de travail et sur les salaires. Pour moi, en Europe c’est le social et la justice sociale qui doivent être les priorités des priorités. C’est pourquoi je veux savoir pour quelle Europe se battent les candidats qui se présentent aux élections européennes en mai prochain. Où veulent-ils conduire ce projet?
Pensez-vous que les gens de votre région d’origine en France comprennent les enjeux de l’Union européenne?
Pas toujours. Quand je reviens dans le village où je suis née et que je parle avec ma famille, je vois bien qu’ils ne connaissent que très peu ce que l’Union européenne fait au quotidien. Je crois que je peux apporter un peu de précision dans ces discussions. A ceux qui sont anti-Union européenne j’essaie aussi d’expliquer, par exemple, que si dans un marché mondialisé on se limite aux solutions nationales, on n’arrivera nulle part. Le marché unique européen peut être un projet qui permette à l’économie de se développer et à la justice sociale de s’exercer, et cela à l’échelle d’une grande entité géographique. C’est un projet unique, mais sans politique sociale, ce projet perd de sa valeur et de son intérêt pour les gens. C’est pour cela qu’il faut faire de la politique sociale au niveau européen! Essayer de faire progresser les choses, à partir de points de vues et de bagages culturels très différents me plaît ; c’est aussi ça que j’aime dans l’Europe.
D’où vient votre conviction au service d’une Europe unie?
Je fais partie de la génération dont les parents ont vécu la guerre. Mon père a toujours considéré l’Europe comme l’avenir de ses enfants. J’admire beaucoup cette conviction de mon père, et ce d’autant plus qu’il a été prisonnier de guerre et qu’il a vécu des moments très difficiles pendant la seconde guerre mondiale. Mes parents m’ont élevée dans l’idée qu’il fallait toujours ouvrir des portes, et ils l’ont fait pour chacun de leurs enfants. Je crois qu’il s’agit là d’une valeur fondamentale, dont découlent beaucoup d’autres.
Paix, Solidarité, Emploi. L’Europe est notre avenir. Cela ne tient qu’à nous ! »
Bernadette Ségol – © ETUC/CES