A la veille du scrutin européen du 25 mai, les représentants des collectivités, réunis notamment au sein de l’Association française du Conseil des communes et régions d’Europe , réclament une Europe plus sociale et plus soucieuse du développement des services publics locaux .
Les élections européennes n’attirent pas l’attention des citoyens ? Elles intéressent en tout cas les élus locaux ! Pas moins de 800 d’entre eux ont participé aux forums organisés par l’Association française du Conseil des communes et régions d’Europe (AFCCRE), entre octobre et février derniers. Le volet social de l’Europe s’y est imposé comme enjeu principal, avec la jeunesse et les services publics.
Des garanties sociales :
Parmi les sujets faisant consensus comme priorité de la prochaine législature européenne, l’emploi figure en tête, notamment celui des jeunes. Avec 5,7 millions de moins de 25 ans sans emploi au sein de l’Union européenne, plusieurs associations d’élus demandent la mise en place de dispositifs spécifiques pour favoriser l’accès à un premier emploi, notamment dans les régions où le taux de chômage est supérieur à 10 %. L’inclusion sociale et la lutte contre la pauvreté font partie également des enjeux, notamment en termes de gouvernance des politiques européennes et d’adaptation aux besoins locaux. Selon Patrick Kanner, président (PS) du conseil général du Nord, l’Europe ne doit pas rester « un outil financier, mais une incitation à créer du lien dans les territoires. C’est un outil de la justice sociale ».
Autre sujet qui sera sur la table du Parlement : le logement social. Alors que la commission a eu, ces dernières années, une lecture restrictive du service public du logement social, la Cour de justice de l’Union européenne doit rendre une décision sur le fond d’ici à la fin de l’année.
L’enjeu : déterminer si les conditions d’attribution des logements sociaux sont à définir en fonction des besoins et des marchés locaux ou s’ils dépendent d’une appréciation générale face à une logique concurrentielle du secteur privé. Elisabeth Morin-Chartier, députée européenne (UMP) et ancienne présidente de la région Poitou-Charentes, estime que le prochain mandat « doit être celui de l’Europe sociale ».
Des moyens pour la jeunesse :
Malgré un budget global en baisse, l’UE a approuvé en novembre dernier une augmentation des moyens pour le programme Erasmus + sur 2014-2020, l’élargissant notamment à l’apprentissage. La jeunesse et sa mobilité ne sont pas une nouveauté. Elles figurent encore et toujours parmi les priorités des élus locaux. « L’extension d’Erasmus + est positive, mais nous devons favoriser aussi une mobilité choisie et pas seulement subie, en raison de la crise.
Nous constatons une forte mobilité des jeunes espagnols, par exemple. Il faudrait renforcer la garantie-jeunesse, afin de proposer à chaque jeune européen un emploi ou un projet dans les mois qui suivent la fin de ses études. Cela implique d’augmenter le budget européen et de créer des ressources propres à l’UE », assure Karine Daniel, vice-présidente (PS) de Nantes métropole. De nombreux élus locaux sont convaincus que la construction d’une citoyenneté européenne passe par ses jeunes, notamment grâce à des programmes d’échanges, rencontres et projets.
Les services publics locaux
Bruxelles en fait trop sur la question des services publics locaux, selon les associations d’élus : la commission a tendance à surinterpréter les risques de fausser le marché intérieur avec des aides en faveur de services publics locaux. « Le législateur européen n’équilibre pas suffisamment l’intérêt général et l’intérêt économique lorsqu’il publie une réglementation sur les services d’intérêt économique général », souligne le Conseil des communes et régions d’Europe dans un manifeste à l’approche des élections européennes. Selon le collectif, la commission aurait tendance à ne pas respecter les règles de proportionnalité et de subsidiarité.
Si le paquet « Almunia » et la directive services ont permis ces derniers mois de clarifier et de rééquilibrer le cadre des aides d’Etat, encore faut-il que ces règles soient appliquées. « L’un des enjeux du mandat sera la simplification de ces textes par le Parlement afin qu’ils soient réellement applicables dans les Etats membres. Il s’agit de prendre en compte les spécificités locales pour garantir des services aux citoyens », explique-t-on au sein de l’AFCCRE.
Le paquet ferroviaire figure lui aussi en bonne place parmi les dossiers examinés au cours de la prochaine mandature. Il en est de même de la définition du service public de transport de passagers. Par ailleurs, dans les semaines suivant son installation, la commission devrait se pencher sur une éventuelle nouvelle législation en matière de TVA pour les organismes publics et d’exonérations fiscales d’intérêt public.
De différentes manières, aussi bien parmi les partisans que les opposants de l’Union européenne, la protection apparaît en outre comme l’une des principales attentes, dans un climat économique et social tendu. « La construction d’une Europe forte, protectrice de ses citoyens et capable de peser sur la scène mondiale suppose de renforcer ses moyens », considèrent les partisans de l’UE. Tandis que ses détracteurs la perçoivent « comme une cause ou un facteur aggravant à la crise et non comme une solution ».
Dans les territoires ruraux comme dans les métropoles, l’UE paraît incontournable. Soit comme facteur de développement, pour ceux qui considèrent que sans la PAC ou les fonds structurels les régions françaises seraient incapables d’affronter la mondialisation. Soit au contraire comme l’institution qui, par ses « dérives libérales », enlève toutes les protections qu’offraient jadis les Etats-nations. Les élus savent, en tout cas, l’importance de cette élection qui permettra de peser directement sur la composition de la prochaine Commission européenne. »
Madeleine Chopin, Pablo Aiquel