Les eurodéputés ont voté pour une rallonge du budget européen 2015. 2 milliards d’euros les séparent du projet du Conseil, ce qui augure de négociations difficiles. Le Parlement européen a voté mercredi 22 octobre à une large majorité, soit 464 voix pour et 186 contre, pour un projet de budget 2015 ambitieux. Le Parlement européen a ainsi décidé de relever les crédits d’engagement à 146,3 milliards d’euros et les crédits de paiement à 146,4 milliards pour 2015. De même, pas question de réduire les revenus de l’UE. Les eurodéputés ont donc annulé les propositions de coupe estimée à deux milliards d’euros.
Selon Jean Arthuis (ADLE), le président de la commission du budget au Parlement européen, ce budget sera tout entier dévoué au développement, à la croissance, à la création d’emploi et à la solidarité.
Ainsi les petites et moyennes entreprises et les programmes de recherche et d’éducation, parmi lesquels Erasmus+, devraient recevoir 190,5 millions d’euros de plus, ont déclaré les députés. Les agences de supervision financière, les agriculteurs et les pêcheurs touchés par l’embargo russe et le fonds d’aide de l’UE pour les citoyens les plus défavorisés devraient également recevoir davantage (respectivement 6,1 millions, 30 millions et 16,7 millions), a déclaré le Parlement.
L’UE en pleine crise de paiement
En session plénière à Strasbourg, les parlementaires ont approuvé deux textes relatifs au budget de l’Union européenne. L’un porte sur le budget rectificatif 2014 et l’autre sur le budget 2015.
Dans la perspective d’une conciliation avec le Conseil, le Parlement veut maintenir une position ferme. Il veut d’abord un accord global sur les budgets rectificatifs 2014 avant de négocier sur le budget 2015.
En effet, depuis 2010, l’UE accumule les impayés et fait face à une crise des paiements. Si cette année-là la somme totale des impayés atteignait déjà 5 milliards d’euros, elle pourrait bien monter jusque 30 milliards d’euros en 2014. Pour les eurodéputés, la priorité est de régler le problème des impayés.
>> A lire aussi : La fonte du budget européen frappe de plein fouet l’aide au développement
Selon Alain Lamassoure, chef de la délégation française PPE au Parlement européen, 80 % des factures impayées concernent les fonds structurels. Auparavant les collectivités territoriales avançaient l’argent des aides européennes. À présent, par manque de liquidité, elles n’avancent plus d’argent et les PME en payent directement le prix.
« Il faut insister sur le fait que derrière tous ces chiffres et ces factures impayées, on trouve des citoyens qui attendent leur paiement. Il y a des étudiants Erasmus qui sont aujourd’hui dans une situation floue dans la mesure où le sort de leur bourse n’est pas clairement défini », a déclaré l’espagnole Eider Gardiazabal Rubial, rapporteur sur le budget 2015.
« L’Europe se déshonore dans une telle dérive. Le Conseil et Parlement européen ont convenu d’un niveau d’engagement. Il vient un moment où il faut honorer les paiements. Ce serait trop simple de s’engager sans en assurer les conséquences », a déclaré Jean Arthuis à l’issue du vote
>> A lire aussi : Jean Arthuis : « La dette de l’UE est contraire aux traités »
Un budget pour la croissance et l’emploi
Les députés souhaitent le renforcement des politiques liées à la recherche au développement et à l’innovation pour encourager la croissance et l’emploi.
« Chacun sait que l’Union a besoin d’une relance pour la croissance et l’emploi. Chacun sait qu’elle ne se fera pas sans argent frais. Alors, que le Conseil sorte de ses contradictions ! Qu’il respecte les citoyens européens ! Qu’il commence par payer ses dettes et tenir ses engagements ! », a affirmé de son côté la socialiste Isabelle Thomas.
A l’inverse, le groupe des conservateurs et réformateurs européens (ECR) s’oppose à une augmentation du budget européen. « Nous n’avons pas besoin d’un budget plus important … nous avons besoin d’un meilleur budget. Par tous les moyens, nous allons améliorer notre investissement dans la recherche, le développement, les nouvelles technologies et de la communication – mais nous devons créer le cadre pour cela en coupant des programmes de dépenses inefficaces et l’application des priorités stratégiques simples », a ainsi déclaré le britannique Richard Ashworth.
Jean-Claude Juncker se veut rassurant
De son côté, Jean-Claude Juncker, dont le collège des commissaires a été adopté par le Parlement, est allé dans le même sens que le Parlement européen et a demandé aux États membres de respecter leurs engagements budgétaires. « L’Union européenne ne peut pas être mauvais payeur. Pour être crédible, elle doit honorer ses engagements », a-t-il déclaré. Il a par ailleurs promis de présenter son plan d’investissement de 300 milliards d’euros avant Noël.
Cependant pour Alain Lamassoure, le futur président de la Commission européenne n’est pas conscient de l’envergure du problème. « Ce qui est dramatique, c’est l’incapacité de la Commission européenne depuis deux ans à faire coïncider les crédits de paiement et les crédits d’engagement ». Selon lui, les programmes qu’annoncera Jean-Claude Juncker ne trouveront pas les financements nécessaires.
Pour le député, le budget européen, par ses moyens de financement est condamné à se réduire comme une peau de chagrin « La question est de savoir s’il va s’en servir comme point de conflit avec le Conseil », conclut-il.